Livre : Toutes à y gagner, enjeux féministes, enjeux syndicaux




C’est au printemps 2017 que les éditions Syllepse ont publié Toutes à y gagner, ouvrage-bilan à l’occasion des vingt ans des Intersyndicales femmes.

Les Intersyndicales femmes, ce sont les journées qui réunissent chaque année entre 300 et 400 personnes, syndicalistes de la CGT, de la FSU et de Solidaires, ou issues du monde associatif ou universitaire autour des questions liées aux droits des femmes. Des journées à la fois ancrées dans le quotidien des luttes, qui permettent d’échanger sur les pratiques sur le féminisme dans le cadre syndical, et aussi parenthèses invitant à la prise de recul et de temps pour la réflexion. C’est ce double objectif que remplit également l’ouvrage.

Regroupant soixante-six contributions, dans lesquelles on retrouve quelques noms bien connus comme ceux d’Annick Coupé, Josette Trat, Danièle Kergoat, Elsa Dorlin, etc., elles sont étendues sur des champs qui semblent bien divers, allant du travail et du syndicalisme des femmes aux violences sexistes en passant par les questions liées aux corps des femmes et aux grands enjeux féministes de notre époque.

Cette diversité de sujets, au centre desquels il y a le travail, illustre le but de ces syndicalistes féministes  : partir des dominations patriarcales subies par les femmes sur leur lieu de travail, pour montrer que cette domination, elles la subissent dans leur vie entière, dans la sphère que l’on voudrait «  privée  » pour la cacher, comme dans la sphère «  publique  » où elles ne sont pas beaucoup plus en sécurité. Au travail, à la maison, dans la rue, dans le syndicat  : ce sont les mêmes femmes qui évoluent dans ces différents espaces et qui ont une voie spécifique à y porter.

Partir du lieu de travail, car c’est là qu’on y rencontre les femmes, qu’on crée des liens professionnels, amicaux, syndicaux, politiques. Comme on y révèle les intérêts de classe dans les luttes du quotidien, on y révèle aussi les expériences et intérêts communs des femmes. Dès lors, on comprend que les commissions femmes des syndicats de lutte et les associations féministes aient en permanence des liens à créer, à renouveler.

Un indispensable pour toute bibliothèque de lutte

Il y a donc un enjeu à intervenir auprès des femmes syndicalement. Il y a aussi un enjeu à les encourager à mener des luttes au travail. Car la lutte donne confiance, confiance en soi, confiance dans le collectif. On dit souvent qu’après les grèves dures dans des entreprises très féminisées, beaucoup de femmes demandent le divorce…

L’ouvrage fait également la part belle à l’internationalisme. Nawla Darwiche et Wassila Ayachi, des camarades d’Egypte et de Tunisie, reviennent sur le rôle des femmes dans les printemps arabes, tandis que les sujets de la mondialisation et des migrations sont largement abordés.

Et c’est évidemment la partie qui analyse les rapports entre les femmes et le syndicalisme qui nous interpelle particulièrement. Si bien sûr les grands noms du syndicalisme que l’on a retenus sont des noms masculins, ce n’est pas seulement parce que leurs femmes devaient s’occuper de la maison pendant qu’ils couraient les Bourses du travail. C’est aussi parce que l’histoire du mouvement ouvrier ne fait pas exception à l’histoire de manière générale  : les femmes, leur existence et leurs actions en sont systématiquement effacées pour divers motifs. Les cinq contributions de cette partie sont donc indispensables pour réparer cette injustice qui empêche de comprendre tout un pan du mouvement féministe.

Toutes à y gagner est un indispensable, pour une bibliothèque féministe bien sûr, mais également pour toute bibliothèque de lutte. Son format d’articles courts le rend accessible, et son champ d’intérêt large lui confère un intérêt pour chacun et chacune.

Adèle (AL Montreuil)

 
☰ Accès rapide
Retour en haut