Syndicalisme

Auchan : pas de grande distribution des richesses




S’il y a un secteur qui engrange des « coronaprofits », c’est bien la grande distribution ! Ce qui n’empêche pas le patronat de licencier et de restructurer.

Nicolas Deluzier, délégué syndical CGT à Auchan à Clermont-Ferrand, est formel : « La grande distribution n’a jamais fait autant de recettes que pendant les périodes de confinement. » Si bien que depuis le 4 novembre, certains rayons non alimentaires ont été fermés par le gouvernement, non pour diminuer la foule dans les magasins mais pour limiter la concurrence avec les petits commerces fermés.

Résultat : une majorité des salariées d’Auchan se retrouvent aujourd’hui en chômage partiel. Pour Nicolas, il ne s’agit ni plus ni moins que d’une « prise en otage des salariées par la Fédération du commerce et de la distribution, le syndicat patronal, pour faire pression sur le gouvernement afin qu’il autorise la réouverture des rayons fermés ».

Des résistances collectives timides mais réelles

Le patronat du secteur, déjà gavé d’aides publiques – 755 millions au titre du CICE versés au seul groupe Carrefour entre 2013 et 2019, sans compter les allègements de cotisations – n’avait pas attendu la crise sanitaire pour restructurer afin d’augmenter les profits au détriment des travailleurs et des travailleuses.

Le contexte sanitaire lui a de surcroît permis d’imposer davantage de « polyvalence » aux salariées et de mieux cibler ses futurs plans de licenciements – le drive, en forte expansion, nécessite moins de main d’œuvre.

Face à ces attaques, la résistance s’organise difficilement dans « un secteur où il n’y a pas d’historique de luttes comme dans la métallurgie ou à la SNCF, et avec des organisations syndicales majoritaires (CFTC, FO) éloignées du syndicalisme de combat », selon Nicolas, de la CGT-Auchan. Difficile également, sur le terrain, de sortir de « sa petite boutique » pour aller voir les salariées des autres grands magasins pour agir ensemble.

Pour autant, pas question de « rester les bras croisés » : 80 % de grévistes le 8 octobre sur la plateforme logistique d’Auchan située à Cournon (près de Clermont-Ferrand), ce qui témoigne d’une vraie colère.

Pendant le premier confinement, les salariées des grands magasins ont su imposer une meilleure protection de leur santé au travail et se sont, provisoirement, réapproprié l’outil de travail. « Toute la réorganisation des magasins a été faite par les “petites mains”, les “premiers de corvée”. C’est à ce moment-là que les collègues se sont dit que les actionnaires ne servaient à rien ! » raconte Nicolas, enthousiaste mais lucide : la socialisation autogestionnaire de la grande distribution n’est pas pour demain.

Une journée d’action revendicative a été fixée au 27 novembre, date théorique du « Black Friday ». Bien entendu, pour Nicolas, « les problèmes d’emploi, de salaires et de condition de travail ne touchent pas uniquement le commerce : c’est l’ensemble du monde du travail qui est concerné ». Et qui doit, selon lui, se coordonner pour agir. Chiche ?

Dadou (UCL Clermont-Ferrand)

 
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