La Poste : « Modernisation » et destruction




À la plate-forme industrielle de tri du courrier de Rouen, a eu lieu à l’automne un mouvement de grève reconductible contre la réorganisation des horaires et les suppressions de postes. Ce mouvement s’inscrit dans une série de luttes contre la « modernisation » de la Poste et ses conséquences.

Les centres de tri ont longtemps été le secteur le plus combatif de la Poste. Chaque département avait son centre de tri. En 1995, la plupart ont été en grève totale, bloquant l’acheminement du courrier.

Volonté de destruction des collectifs

La Poste a entamé il y a cinq ans un vaste plan de modernisation. Cette réorganisation du réseau se base sur une réduction du nombre de centres de tri remplacés par des Pic (Plateforme industrielle courrier). Dans ces Pic, la Poste a installé une nouvelle génération de machine de tri, les MTIPF et les MTIGF (machines de tri industrielle petit/grand format). Ainsi, à Paris et en banlieue, la majorité des centres ont fermé alors que s’ouvraient deux gigantesques Pic à Gonesse et Wissous.

En province, c’est pratiquement un centre sur deux qui a fermé. Les personnels de ces centres n’ont eu le choix qu’entre suivre leur emploi parfois à des dizaines de kilomètres et intégrer un autre service. À moins qu’ils n’aient préféré quitter la Poste ou prendre une retraite au rabais.

Dans les nouvelles Pic, la Poste détruit systématiquement les anciens acquis du personnel et les collectifs de travail. Isolé-e-s sur leur machine, surveillé-e-s 24h sur 24h par des dizaines de caméras, obligé-e-s de badger à chaque déplacement dans le centre, les postières et les postiers sont soumis à des contraintes horaires toujours plus pénalisantes et à une productivité épuisante. Les conditions pour une lutte collective sont de plus en plus difficiles à réunir.

La Poste, qui a tiré la leçon de 1995, a mis en place des moyens antigrève exceptionnels : chaque département a un centre dit de « régulation », qui n’est autre qu’un centre antigrève de tri manuel permanent. Mais la Poste a aussi créé des centres « d’entraide », disposant de machines de tri performantes, comme à Roissy ou Evreux.

Contournement du droit de grève

Lorsqu’un centre tente de se rebeller contre une nouvelle charrette de suppressions d’emploi, ou une énième remise en cause des horaires de travail, la Poste n’hésite pas à vider le centre de son trafic, voire à le fermer complètement comme elle l’a fait à Angers en octobre dernier, alors que 70 % du personnel était en grève.

Depuis avril 2009, la fédération Sud-PTT dépose chaque semaine un préavis de grève national couvrant le personnel des centres de tri le vendredi et le samedi. Mais le nombre de grévistes, très inégal suivant les centres, et le refus des autres fédérations de rejoindre le mouvement n’ont pas permis pour l’instant d’obtenir une négociation sur les conditions de travail, les horaires et l’emploi.

Un rassemblement national du personnel des Pic et des centres de tri à l’appel de Sud est prévu le 21 janvier 2011 à Paris.

À Rouen Madrillet : une résistance opiniâtre

Malgré les changements de nom (CT, CTA, CTC, Pic) et de lieu (Rouen, Sotteville, Saint-Etienne-du-Rouvray), le centre de tri de Roen Madrillet reste un lieu de résistance au rouleau compresseur de la direction de la Poste. Aux dernières élections professionnelles, 70 % du personnel a voté Sud et 23 % CGT. Plutôt qu’une concurrence stérile, les deux sections travaillent systématiquement en intersyndicale (audience en commun, préavis de grève identiques). Mais surtout c’est l’ensemble des agents du centre qui prend toutes les décisions en AG, de jour comme de nuit.

Correspondant AL Rouen

 
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