Numérique

Censure : Rapport(s) de force avec Facebook




Fin octobre, le média indépendant Rapports de force a été brutalement et sans crier gare effacé de Facebook. Retour sur un épisode qui confirme nombre de nos analyses et doit nous pousser à aller encore plus loin dans la «  dégafamisation  ».

Liens effacés, nouvelles publications refusées  : jeudi 15 octobre, Facebook a violemment frappé le média indépendant Rapports de force. Celui-ci, dont le motto est «  L’info pour les mouvements sociaux  », n’a reçu aucune mise en garde, aucune explication, et a simplement découvert soudainement la situation, complètement injustifiée – il semble qu’elle découle d’un signalement largement abusif d’un article tout à fait banal.

David contre Goliath ?

Situation dramatique s’il en est  : plus de la moitié du trafic quotidien sur le site web de Rapports de force provient de Facebook et ce trafic est vital. Financièrement, Rapports de force vit uniquement des dons de son lectorat, et avoir un lectorat aussi large que possible est donc réellement indispensable  ; se priver de plus de la ­moitié de son audience en abandonnant Facebook n’est semble-t-il pas une option  [1].

Dès lors, comment instaurer un rapport de force avec l’une des cinq plus grosses entreprises de la Big Tech  ? Après des menaces publiques de poursuites en justice, Facebook a fait un (demi)pas en arrière en autorisant de nouveau les publications de Rapports de force.

Mais les liens effacés n’ont pas été rétablis, et tout le travail de communication des deux dernières années reste donc bel et bien réduit à néant. Le média victime de censure devait-il aller plus loin et porter effectivement plainte, sachant que financièrement l’entrée en justice nécessitait de sacrifier la moitié du budget 2020 et que l’armée d’avocats sur-payés de Facebook l’aurait probablement emporté  ? La rédaction de Rapports de force, bien que prête à se battre, a finalement estimé que non  [2]. Cette difficile décision lui appartient.

En tant que libristes libertaires, nous affirmons que ce fait divers (qui n’en est pas un, et on ne peut que déplorer l’absence de soutien plus ferme de la part du milieu journalistique face à ce qui est sans l’ombre d’un doute une atteinte à la liberté de la presse) ne devrait surprendre personne. Ces abus de pouvoir de Facebook ne sont pas nouveaux et sont logiques  : c’est une entreprise privée capitalistique, que l’inconscient collectif et Hollywood ont peut-être transformé en service public philanthrope, mais dont le seul et unique objectif reste l’accumulation de profits.

Et pour ce faire, rester en bons termes avec les dirigeants des États et les grands patrons est indispensable  : d’où la censure de pages Facebook anticapitalistes, d’où la censure de médias comme Rapports de force, et d’où aussi, il faut bien le reconnaitre, la dissolution de vastes groupes trumpistes coupables de «  fausses nouvelles  » pendant la campagne électorale étasunienne  [3] .

Vive le web alternatif !

Les militantes et militants anti-Gafam sonnent l’alarme depuis des années  : confier nos moyens d’expression, d’accès au savoir, nos outils de travail à ces multinationales qui ont fait du monopole un art de vivre et qui se moquent parfaitement des droits humains et des libertés publiques, est une erreur monumentale et historique.

Il n’est peut-être pas trop tard pour faire marche arrière. Comme nous l’avons déjà expliqué plusieurs fois dans cette rubrique, les alternatives existent. Des réseaux sociaux libres, décentralisés, fédérés les uns avec les autres à travers le fédiverse  [4], respectueux de votre vie privée existent. L’Union communiste libertaire vous attend sur Mastodon, où Rapports de force est désormais également  [5] , mais aussi Diaspora, Peertube, Mobilizon !

Léo (UCL Lyon)

[1« Notre éviction de Facebook pourrait signer la fin prochaine de Rapports de force », Rapports de force, 22 octobre 2020.

[2« Une demi-victoire dans notre litige avec Facebook  », Rapports de force, 30 novembre 2020

[4«  Comprendre le fédiverse  », Alternative libertaire, décembre 2019

 
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