Luxfer : L’utilité sociale au cœur du combat




Au plus fort de la crise sanitaire, l’État et le groupe Luxfer n’ont pas cédé aux exigences des ex-salariées de l’usine auvergnate, malgré le besoin pressant de bouteilles à oxygène en France et dans le monde. Les ­travailleuses et les travailleurs persévèrent !

Il y avait beaucoup de monde, jeudi 25 juin – par un temps caniculaire –, pour soutenir les « Luxfer » devant l’usine de Gerzat, au nord de Clermont-Ferrand. Tout l’appareil militant de la CGT, des unions locales du département à la confédération – avec la présence du secrétaire général, ­Philippe Martinez –, en passant par l’union syndicale CGT de la métallurgie, très présente dans la région, s’est mis en branle pour faire de cette journée une réussite. FO et, dans une moindre mesure, Solidaires, sont restés au second plan.

Même si ce sont surtout les partis politiques et leurs têtes d’affiche (Mélenchon, Glucksmann...) qui ont récolté les lauriers médiatiques, le moment le plus fort de la journée fut l’intervention des travailleurs et des travailleuses de GM&S (Creuse), qui ont rendu un vibrant hommage à leur délégué syndical Yann Augras, mort deux semaines auparavant. La question que personne ne posera, évidemment, mais qui trotte dans la tête de tout le monde : était-ce un baroud d’honneur ou une volonté de repasser à l’offensive après que le confinement ait interrompu l’occupation de l’usine  [1]



Promesses politiciennes

Face à un État qui ne lâche rien pour protéger les intérêts des capitalistes, condamnant toute reprise de l’usine par la voie légale, les ex-travailleurs et travailleuses de Luxfer sont dans une situation fragile. Les politiciens se pressent à leur chevet (PS, Génération-s, PCF, LFI, EELV…) pour promettre, comme à leur habitude, qu’avec eux au pouvoir, tout serait différent. Un discours peu coûteux, qui rencontre bien évidemment un large écho. L’heure n’est pas à donner des leçons mais à se retrousser les manches pour que l’espoir vive, pour que les capitalistes comprennent que le camp du travail ne se laissera pas dépouiller sans réagir. Et ce ne sont pas les promesses politiciennes, pas vraiment désintéressées, qui nous aideront à nous organiser en tant que classe pour lutter ici et maintenant contre nos exploiteurs, nos licencieurs, et préparer le changement de société.

L’alternative autogestionnaire à populariser

Des repreneurs existent. C’est d’ailleurs cette piste qui semble la plus crédible, bien avant la nationalisation ou même la reprise de l’entreprise sous forme coopérative. Si, en tant que communistes libertaires, nous privilégions la dernière option, nous savons bien entendu tous les obstacles qu’une éventuelle Scop (ou Scic [2]) pourrait rencontrer dans le cadre de l’économie capitaliste. Les Luxfer ne les ignoraient pas au moment où ils et elles avaient monté leur projet de coopérative, avant de changer de fusil d’épaule face au refus de l’ancien patron de leur céder l’entreprise.

Quel que soit le cas de figure, personne ici ne fera la fine bouche : la moindre avancée ne pourra être obtenue que grâce au rapport de force que le mouvement syndical sera capable d’imposer. Les carences avérées de l’État dans ce dossier, qui auraient pu être dramatiques en cas de pénurie de bouteilles d’oxygène, pourront-elles donner un nouveau souffle à la perspective d’une reprise de l’usine par les ex-salariées ? À nous, syndicalistes et libertaires, de faire en sorte que cette idée gagne du terrain !

Dadou (UCL Clermont-Ferrand)

Photo Hervé Chellé.

Les autres articles du dossier :

[1« Changeons d’air, socialisons Luxfer ! », Alternative libertaire, mai 2020.

[2Une société coopérative d’intérêt collectif (Scic) associe obligatoirement autour d’un projet des acteurs salariés, des acteurs bénéficiaires (clients, usagers, riverains, fournisseurs…) et des contributeurs (associations, collectivités, sociétés, bénévoles) pour produire des biens ou des services d’intérêt collectif au profit d’un territoire ou d’une filière d’activités.

 
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